ACTUALITÉS


Texte des nouvelles primées au concours J. de Romilly (édition 2020)

Avec un an de retard en raison de la pandémie de Covid-19, nous avons récompensé les lauréats de l'édition 2020 de notre concours de nouvelles en même temps que ceux de l'édition 2021 et nous publions ici le texte des meilleurs d'entre eux, en les remerciant pour leur patience ! 

Catégorie Enseignement supérieur

1er prix : Lilou Marbais, Lycée Poincaré, Nancy

Titre de la nouvelle : Anonyme

Les corps jonchaient la plaine, les eaux bouillonnantes du Simoïs se gorgeaient de sang. Si les dieux avaient daigné jeter un dernier coup d’œil en contrebas, tandis qu’ils remontaient vers l’Olympe, armes étincelantes au poing, rassénérés par la promesse d’un long festin, propre à effacer l’éphémère passion que suscitait chez eux la manipulation de leurs jouets favoris, ces si frêles mortels, ils n’auraient vu qu’un lointain amas noir, égayé d’un ruban rouge. 

Les corbeaux, eux, descendaient à toute allure, se promettant eux aussi d’appétissantes réjouissances. 

Si les héros avaient daigné jeter un dernier coup d’œil en arrière, tandis qu’ils rentraient au camp sur leurs chars flamboyants, armures dégoulinantes du sang illustre de leurs congénères, ce sang qu’épaississait la promesse d’un destin extraordinaire et qui distinguait cette race à part dans l’humanité, la race chantée par les poètes, ils n’auraient vu qu’un camaïeu de teintes sombres et de bronze. Derrière eux, la horde des fantassins survivants clopinait péniblement. Eux n’avaient pas même le luxe de se retourner ; il fallait rentrer le plus vite possible, avant que les blessés qu’on soutenait ou qu’on traînait n’exhalent un dernier râle. 

Mais eux gardaient tout en mémoire. Le sol irrigué par le sang séché. Les hampes de lances brisées qui se dressaient fièrement, comme autant de poings vengeurs. Les cuirasses qui réfléchissaient la lumière sanguinolente du soleil couchant, et dissimulaient le vermeil des plaies. Les cadavres enfin, disloqués, entremêlés, abandonnés. On reviendrait leur rendre les derniers honneurs à la faveur de la nuit, lorsque l’urgence et le dégoût des fins de bataille se seraient dissipés. Mais pour l’heure, personne ne venait leur murmurer un mot d’adieu, prononcer une dernière fois leur nom. Seuls les corps princiers avaient déjà été recueillis, pour que tout le monde voie leurs glorieuses dépouilles flamboyer sur les ardents bûchers. 

Les simples soldats, peu importait qu’on ne puisse plus les reconnaître. Peu importait que personne ne puisse mettre un mot sur leurs visages ravagés, leurs crânes éclatés, leurs entrailles répandues. Peu importait que personne ne se souvienne de qui ils étaient. Qu’avaient-ils fait, après tout ? Rien de plus, rien de moins que les autres : se battre pour exister. Sur terre ou, avec un peu de chance, si leurs faits d’armes étaient assez remarquables, dans les épopées et les mémoires. C’était la promesse qui compensait les rudesses de la guerre : la belle mort. 

Mais ce qu’ils ignoraient, ou feignaient d’ignorer, c’était que les dés étaient pipés. Les Muses ne sélectionnaient que les noms de digne lignée. Et leurs autres demeuraient à jamais les muets, ombres entre les vers, les anonymes. Condamnés à être oubliés. 

Lui faisait partie de ces innombrables soldats qui n’accéderaient pas même aux catalogues de héros homériques. Pas même une mention au détour d’un vers. Il était un anonyme, qui boitillait sur le sol rocailleux, soutenu par un camarade et un débris de lance. Il avait perdu son bouclier. Sur ses épaules, sa cuirasse pesait bien lourd. La douleur irradiait à chaque pas dans sa jambe blessée. 

Il était un anonyme, qui pourrait remercier les dieux de l’avoir épargné un jour de plus. Qui pourrait espérer, demain encore, rentrer un jour dans sa contrée, ou au moins avoir une belle mort, pour que, là-bas, au pays, on puisse trouver quelque consolation dans le récit de ses hauts-faits. Il était un anonyme chanceux, pour l’instant. La mort infamante, dans l’indifférence générale, l’ultime et honteuse tentative de fuite, le râle terrifié et surpris, tout cela n’était pas encore pour lui. 

Mais lui, il avait la rage au cœur. Lui ne murmurerait aux dieux aucune parole de gratitude soulagée, lorsqu’il irait se coucher. Lui veillerait toute la nuit, le visage fermé, immobile et silencieux, une statue de sel. 

Chacun de ses pas était une nouvelle torture, mais chacun de ses souffles était une souffrance indicible, une nouvelle épine enfoncée dans son cœur. Chacune de ses respirations était une nouvelle occasion de se souvenir. Il essayait de repousser ces assauts, mais rien n’y faisait. Son esprit était enchaîné au fil des dernières heures, et le vautour de la mémoire revenait inlassablement s’abattre sur lui. 

Le matin, à l’aube, derniers préparatifs avant le combat. Aiguiser une dernière fois ses armes, ajuster les pièces des cuirasses. Face à l’imminence du péril, les attitudes divergeaient : se taire, s’isoler, se laisser envahir tout entier par la perspective du combat à venir ; ou bien faire comme si de rien n’était. Lui était de ceux-là. Il ne fallait pas se leurrer, sa gorge se serrait comme celle des autres, chacun de ses gestes se paraît d’un halo d’appréhension, mais il refusait de céder à l’appel de la mort, il aurait bien assez le temps de la regarder en face. Alors il plaisantait avec son meilleur ami de toujours, échangeant les mêmes boutades qu’à l’ordinaire, se chamaillant comme deux enfants. Ils avaient grandi ensemble, deux maisons voisines, les pères entretenaient de bonnes relations, les mères se rendaient entre elles de menus services ; l’histoire ordinaire, en somme. Les longs après-midis de jeu sur le chemin poussiéreux devant leurs habitations, c’était ensemble qu’ils les avaient connus ; ensemble, les bêtises idiotes, les premiers apprentissages du travail et de la vie ; ensemble, les premières idylles, les premiers rêves, qu’on se confiait sous les rameaux de l’olivier, dans le secret d’une nuit claire et chaude. Ensemble aussi, les premières désillusions, les premiers désaveux, les premières expériences de l’amertume de la vie. Les premières joies, les premières peines, les premiers amours, ils avaient tout vécu ensemble. 

Ils avaient joué ensemble à la guerre, et à présent, ensemble ils la faisaient. 

Au fond, c’étaient deux enfants grandis trop vite, deux garçons à peine sortis de l’adolescence, que les querelles des puissants avaient projetés dans le tourbillon effréné des luttes et des conquêtes. Ils savaient à peine pourquoi ils combattaient ; on parlait de la belle Hélène enlevée, de Ménélas trompé au sein même de son palais, des rumeurs et des histoires fantasmées courraient le soir, au coin du feu, mais ils ne savaient guère pourquoi leur roi, Ulysse, s’était déplacé aussi jusqu’aux lointains rivages de Troie. Tout cela ne les concernait guère, du reste ; finalement, la trame qui tisserait les gestes épiques avait même moins de valeur à leurs yeux que les chants des aèdes qu’ils écoutaient chez eux. Elle était trop réelle, et elle leur coûtait trop. Les deux jeunes gens, malgré leurs bravades de jeunes coqs avant le combat, ne pouvaient s’empêcher de ressentir une certaine colère. Certes, on leur offrait ainsi une occasion unique de ne pas se contenter de la morne vie commune, à trimer des saisons entières sur terre avant de partir, juste pour un nom fugacement gravé dans une poignée de mémoires, et une éternité à errer dans le champ des Asphodèles. On leur donnait l’occasion de se distinguer, de revenir en héros, ou au moins de rehausser leur nom par l’éclat d’une belle mort. C’était pour ça qu’on les avait poussés à partir. C’était pour ça qu’ils avaient accepté, malgré leurs réticences initiales. 

- Tu regrettes, toi ? lui avait un jour chuchoté son meilleur ami.

- Je ne sais pas. 

Car le lot des anonymes, malgré l’amertume et les regrets, la peur et le mal du pays, était encore et toujours d’espérer. 

Aujourd’hui, le combat avait commencé comme à l’ordinaire, dans le fracas des armes entrechoquées, les vociférations proférées pour s’encourager ou se provoquer, le tumulte exaltant et effrayant de la bataille. Comme d’habitude, les deux amis combattaient côte à côte, et coordonnaient insensiblement leurs gestes. Comme la plupart des soldats d’Ithaque, ils s’étaient plus destinés à élever les chèvres qu’à combattre, et n’avaient reçu qu’une instruction militaire sommaire ; mais ils se défendaient bien, la fougue de la jeunesse compensait le manque de maîtrise. 

Pendant le combat, il se remémorait un jour, lointain déjà, perdu dans les brumes de sa vie d’avant, sa vie à Ithaque. Ils étaient partis ensemble garder les troupeaux familiaux. Leurs chèvres vagabondaient sur les flancs escarpés des collines de l’île, et eux marchaient tranquillement, s’aidant de leurs bâtons. Ils se taisaient, pris dans ce silence confortable qu’on ne connaît qu’avec les personnes de grande confiance. 

Ils s’étaient assis sous un olivier, avaient sorti le pain et le fromage qui constitueraient leur repas, et avaient regardé leurs animaux gambader. C’étaient de bonnes bêtes, bien dressées, qui malgré l’appel de la liberté ne s’éloignaient jamais vraiment. 

Ils avaient parlé de tout et de rien, de la pluie et du beau temps, du mariage prochain du neveu du voisin, et de leur ami qui fréquentait une fille de la ville, avait-il ses chances ? Ce n’était rien de plus que du badinage, et derrière tous ces mots apparemment si négligeables, pesait le poids de tous les non-dits. 

Son meilleur ami avait sorti une outre remplie de vin coupé d’eau. Sous la chaleur pesante du début d’après-midi et les assauts incessants du soleil, ils se sentaient grisés, les propos se faisaient plus décousus, s’osaient plus grivois. Derrière affleurait pourtant l’inquiétude ; pourquoi étaient-ils incapables d’envisager de faire comme leurs camarades, alors qu’ils ressentaient profondément en leur chair, l’éternelle préoccupation, l’éternelle crainte, l’éternel rêve, celle d’une idylle digne des héros et des rois, des amants unis pour l’éternité au sein des constellations ?

C’était lui qui le premier s’était penché, insensiblement d’abord, puis plus franchement. Leurs lèvres s’étaient jointes, elles avaient un goût de miel, un goût de vie.

Or, la bataille, si ordinaire, avait brusquement changé de cours lorsque, pour la première fois, la piétaille troyenne, des anonymes comme eux, s’était fendue pour livrer passage à une armure rutilante, richement ornée, une armure de héros. Jamais ils n’en avaient vu de si près, à quelques fantassins de distance, pris d’une frénésie guerrière. D’habitude, ils n’affrontaient que des soldats ordinaires. 

Les guerriers ennemis acclamaient, à présent. Hector. Le nom déjà mythique était martelé à leurs oreilles, inlassablement, tandis que le héros enfonçait les lignes grecques. 

Dans leurs dos ruissela une sueur froide. Son compagnon flancha. Sa main tremblante lâcha son arme. 

Le tourbillon meurtrier fonçait sur eux, à présent. Il ne restait plus que la fuite, honteuse mais salvatrice. Tourner le dos, réflexe immédiat, létal pourtant. Le coup lui perça la jambe, il s’effondra, se recroquevilla. Eviter les piétinements de la masse des guerriers, se traîner plus loin, à l’abri du cadavre d’un char démantelé, survivre, survivre à tout prix. 

Ses yeux avaient eu le temps de saisir au vol la fatale scène. 

Le second coup porté par Hector. Dans sa rage guerrière, il ne calculait rien, frappait au hasard pour abattre le plus grand nombre d’ennemis possible, se moquait d’achever tous ces adversaires de peu de prestige. Il fallait juste qu’ils tombent.

Et son meilleur ami était tombé aussi. Un jet de sang. La jugulaire. Le corps qui s’abat.

Le monde qui s’écroule. 

S’il retrouvait sa dépouille, perdue quelque part sur le champ de bataille, il ferait en sorte de l’honorer comme il le méritait. Il parlerait. Il raconterait. Car le nom du défunt ne parviendrait pas jusqu’aux lèvres des aèdes, sa lignée n’était pas digne d’être chantée, pas plus que sa mort. Son histoire, leur histoire, n’était pas glorieuse… mais elle aurait pu être longue et belle. 

S’ils n’avaient pas été que des anonymes, pris dans une guerre qui ne les concernait pas.

« Pourquoi donc as-tu commencé par le mot colère ? »

Voici ce qu’Homère aurait dû répondre à Lucien : « parce que la guerre est le lieu de toutes les colères, en particulier de celles que je n’ai pas chantées. 

Les colères des anonymes. »

2e prix : Cécile Jayr, Lycée Bertran de Born, Périgueux

Titre de la nouvelle : Pénélope endormie

L'aurore envahissait par sa lumière l'atelier de Cavelier, logé à la villa Médicis. Rome sommeillait encore, bercée par les souvenirs de son passé antique. Au mont Pincio, seuls résonnaient les glissements du rifloir sur le marbre. Ce matin-là, Cavelier travaillait ardemment. Tous ses membres, toute son attention se portaient sur son œuvre : une femme grecque.

Il souhaitait la recréer, donner à nouveau un air de vie à cette reine d'Ithaque. Cavelier n'avait pas l'audace de la créer. Homère l'avait précédé et il le savait. C'était d'ailleurs dans les pages jaunies de l'Odyssée qu'il avait découvert cet archétype féminin. Pénélope l'avait envoûté. Depuis, des moments de spéculation et d'évasion ravissaient son esprit et l'emmenaient sur l'île d'Ithaque, aux confins de la mer Ionienne. Le monde grec était alors enveloppé des douceurs nocturnes. Et en un somptueux palais, il contemplait Pénélope ôter un à un les fils de laine et de soie. C'est à peine si elle les effleurait de ses blanches mains. Elle tissait le linceul de son beau-père Laërte le jour et l'effilait la nuit venue. Elle trônait en majesté, dotée d'une allure de reine. Elle n'avait rien à envier aux déesses de l'Olympe. Sa grâce céleste égalait celle de la jalouse Artémis. Cavelier avait conçu en secret le projet de reproduire la Pénélope d'Homère. Il souriait à l'idée de la doter d'un support de marbre, elle qui jusque-là reposait sur des papyrus, des parchemins et des pages jaunies. Son fantasme peu à peu prenait forme et devenait réalité. A l'image du poète archaïque, il souhaitait lui donner un air de vie. Pour cela, le sculpteur avait tout choisi. Le marbre, par sa transluminescence, offrait un semblant de peau humaine, et sa transparence donnait à la sculpture une profondeur visuelle au-delà de sa surface, lui conférant ainsi un certain réalisme. La technique en ronde-bosse achevait de participer à un semblant d'être humain. Même les instruments du sculpteur jouaient le jeu : les glissements du rifloir semblaient scander les beaux titres de ce personnage homérique. Son œuvre achevée semblait vivante. Et, de ses doigts, Pénélope dénouait les fils. Droite et gracieuse, son regard se portait sur sa tapisserie. Elle était seule en éveil à cette heure de la nuit. 

Les clochers de l'église de la Trinité des Monts retentirent, ils marquaient les sept heures et tirèrent le sculpteur de ses rêveries.

« D'un instant à l'autre, il sera là... » murmura Cavelier, les yeux toujours rivés sur sa création. En effet son maître, David d'Angers, sérieux, rigoureux, et ponctuel viendrait ce matin-là juger ses travaux. Et il verrait l'œuvre achevée. Tout était prêt pour l'accueillir. Cavelier, la joie au cœur et la fierté au front s’apprêtait à lui ouvrir la porte de l'atelier après avoir rangé ses outils. Mais à peine saisit-il sa pochette en cuir d'agneau dans laquelle il conservait soigneusement son vieux rifloir, ses râpes et sa gradine, emportés de Paris quelques mois plus tôt, qu'il se retourna vivement. Sa serviette chuta.

Qui était donc entré ? Personne. Les yeux de Cavelier percevaient-ils quelque chose ? Non, rien. Mais pourtant ses sens ne le trompaient pas, il entendait un souffle humain, léger et presque imperceptible. Cavelier resta suspendu à ces murmures, sans oser bouger. Soudain un bruit résonna sur le sol : une quenouille garnie d'un fin lainage et dont le manche était d'or venait de tomber à terre. Le son de la chute fut secondé immédiatement par une voix mélodieuse mais où la tristesse avait fait son logis.

« Cessez mes doigts, cessez cette ruse. Seulement un instant, un court instant, un simple instant, puis-je évoquer mon bonheur passé ? Ce bonheur, que depuis vingt longues années je ne cesse de pleurer.

Mais toi, jeune homme à la mine aimable, qui es-tu ? Ton attitude ne révèle en rien un prétendant. »

Cavelier se retourna, elle était là devant lui. Jamais il n'aurait pu décrire cette grâce céleste. Il la regarda, ses lèvres se mouvaient péniblement, mais aucun mot ne pouvait en sortir. Alors il lui sourit, d'un sourire plein de respect et d'admiration. Ce sourire plut à Pénélope. En un regard, une confiance s'était établie entre eux. C'est pourquoi la langue de la reine se délia :

« Le roi de Sparte, Icarios, et la reine Périboeia me donnèrent le souffle de la vie. C'est donc dans leur palais que je grandis, heureuse et épanouie. Mon enfance fut douce, tintée de chants et de rires. J'aimais les grandes fêtes que mon père donnait lors des courses de chevaux, domaine dans lequel il était, parmi tout le peuple achéen, le champion. En ces temps-là, moutons rôtis, veaux au miel, figues fraîches et vins à la couleur de pourpre couvraient les tables. Et moi, n'étant que joie et gaieté, dansait autour de ces messiers cuirassés et de ces dames de soie vêtues. Infantile et innocente, je les charmais sans le vouloir. De mon passage se dégageait un parfum, aux doux aromates, dont ma nourrice le matin imbibait mes tempes. Cet élixir fut sûrement la cause de mon involontaire séduction. Car bien vite le désir de m'épouser en saisit plus d'un. Mais mon père ne céda pas face au premier quémandeur. En témoignage de son amour paternel, il souhaitait m'accorder au plus méritant. Ainsi il obligea mes prétendants de jadis, tous princes grecs possédant mille richesses, à disputer ma possession dans des jeux donnés par lui-même. Soucieuse de mon sort, j'assistais à la scène le souffle suspendu. Ulysse fut le vainqueur. Il m'emmena au palais d'Ithaque. Entre ces murs, peu de temps après, je donnai naissance à notre fils que son père baptisa du doux nom de Télémaque, ma douce lumière. Mais les dieux ne semblaient pas supporter mon bonheur. Ils décidèrent de la guerre de Troie où Ulysse partit combattre. Sculpteur, tu me regardes, et je devine tes pensées. Tu me penses venue d'un autre monde, d'une autre époque. Les dieux n’octroient point à tous les mortels la couronne et le drapé de pourpre. Cependant, la douleur nous est commune, la douleur règne à tous les siècles, la douleur est humaine. Les dieux l'envoient et alors comme un insecte à un fruit attaché, elle s'empare de notre cœur, le ronge, le baigne de larmes et l'imprègne d'amertume. Comprends-tu mes malheurs ? Tu me sculptes tout à ma ruse. Et si chaque nuit je l'exécute c'est bien parce que je suis malheureuse. A Ulysse je désire rester fidèle, mais tout m'en empêche. Il est parti avec les fils d'Atrée, depuis plus de dix ans, vers Ilion. Hermès psychopompe aurait mené son âme chez Hadès. Voilà ce que tout mon entourage pense, et moi-même, dans un moment d'évasion où le courage m'est ôté, je m'abandonne à cette pensée. Mais je la refoule vite, car pourquoi ma douleur serait-elle si vive lorsque Ulysse, mon bien aimé, siègerait aux Champs Elysées ? Il m'a laissé dans son somptueux palais, où les prétendants accourent pour boire ses vins et engloutir ses bœufs, ses moutons et ses chèvres grasses. Ils détruisent la richesse de Télémaque, mon rayon de lune dans ces ténèbres. Un jour Ulysse reviendra, un jour il les chassera et mon bonheur avec lui me sera rendue. Séjourner dans notre palais ne suffit pas aux prétendants. Ils souhaitent qu'un hymen m'unisse avec l'un d'eux. Mais aucun n'occupera le lit partagé avec Ulysse, ce lit qu'emplissent mes sanglots et que trempent mes larmes chaque nuit depuis son départ. Pour me dérober de ceux qui prétendent au trône d'Ithaque, j'ai déclaré faire mon choix lorsque les derniers fils du linceul de Laërte seront tissés. Depuis trois années, la nuit je me lève en hâte et en sanglots pour défaire le travail du jour. Combien de temps durera mon stratagème ?

La douleur, l'attente et ce tissage sans cesse fait et défait m'exténuent. Je souhaite tomber dans les douceurs de l'assoupissement. Ah ! si seulement la chaste Artémis daignait m'envoyer à l'instant le secours de la mort ! »

La reine n'était plus à son discours, ni à son tissage, elle s'était abandonnée au sommeil. Ce dernier l'avait saisie en un instant.

Cavelier contempla Pénélope. Ses paroles imprégnaient son cœur des plus profonds et des plus doux sentiments. Assise sur son trône de chêne, elle dormait, les membres détendus, la tête renversée. Elle tenait dans la main droite son fuseau au fil déroulé. Une larme lentement et lestement glissait le long de sa joue. Cavelier s'approcha, hésita puis d'un geste précis, que la sculpture lui avait appris, recueillit la larme royale. Pure comme le cristal, c'était le témoignage de sa fidélité, de sa tristesse et de son humanité. Aussitôt Pénélope redevint de marbre.

L'entrée fracassante de David d'Angers tira Cavelier de son voyage dans l'Antiquité. Il était de retour au XIXe siècle. Comment expliquer à son maître la posture ensommeillée de son œuvre lorsque quelques instants auparavant elle se tenait droite, les fils à la main et les yeux sur son ouvrage ?

Le silence occupait tout l'atelier, le sculpteur attendait la sentence de son maître. Ce dernier contournait la statue, observait les pieds menus, les pelotes de laine, les drapés de la tunique qui habillait Pénélope. Cavelier étouffait, son cœur était son l'emprise d'un seul désir, le plus violent et le plus fou sûrement que jamais aucun homme n'eut : entendre à nouveau sa reine d'Ithaque.

« Il ne s'agit ni d'une attitude royale, ni de celle, toute divine, dont Homère semble l'avoir dotée dans l'Odyssée. Pensez-vous qu'elle laissait son épaule dénudée ? Et ses cheveux épars ? Vous en faites, jeune homme, une créature bien simple, une femme... »

Cavelier souhaitait garder son secret. Pourtant tolérer les insultes dont Pénélope était accablée lui fut impossible.

« Elle manque de majesté ? Mais pas d'humanité. Son épaule est dénudée ? Mais son amour n'est pas envolée. Ses cheveux sont épars ? Mais la tristesse de son cœur n'a laissé au bonheur aucune part. Et si elle revenait parmi nous, si par un miracle elle daignait se manifester, elle nous conterait le malheur qui l’afflige, sa douleur provoquée par le départ d'Ulysse, et sa fatigue de résister continuellement aux prétendants. Pénélope endormie, Pénélope amoureuse, Pénélope fidèle car dans son sommeil elle rejoint Ulysse dans son voyage. » 

Pénélope s'était endormie et ce fut au tour du spectateur de se réveiller. Il pleuvait à Paris, c'est pourquoi il était entré dans le musée d'Orsay. Il s'était promené dans la grande salle voûtée en attendant que l'averse cesse. Bientôt, comme une hirondelle au début du printemps, les rayons du soleil annoncèrent le retour du beau temps. Pourtant le visiteur n'y prêta guère attention. Il se tenait au pied de la sculpture créée par Cavelier et dévorait Pénélope des yeux. Son esprit s'était envolé, il avait imaginé un dialogue entre le sculpteur et son œuvre. Lorsque la rêverie le rendit à la réalité, il fut envahi de réflexions. En effet, il comprenait désormais qu'un lien fort unissait l'œuvre, l'artiste et le spectateur. Car, à son tour, il avait saisi la douleur de Pénélope. L'inséparable trio, sans lequel l'art perdrait toute sa valeur, lui apparut alors dans toute sa splendeur et son importance. Pénélope, Cavelier et lui-même, homme du XXIe siècle, étaient unis par les liens sacrés de l'art. Plus que saisir toute la portée artistique, il lui semblait assister au voyage d'un mythe antique, celui de l'épouse fidèle, à travers les siècles. Homère par son épopée et Cavelier par sa sculpture participaient à la transmission de cet archétype féminin. Chacun à sa manière avait souhaité donner un souffle éternel à cette femme grecque. Devant cette sculpture, le spectateur saisissait l'immortalité de l'Antiquité. Cette dernière, malgré la succession des siècles, demeurait toujours présente. Elle était comme la mère dont l'enfant a besoin pour mesurer toute la portée de l'humanité. Et penchée sur l'homme du XXIe siècle, elle veillait sur lui. Elle ne sommeillait point, contrairement à Pénélope en larmes.

Catégorie Enseignement secondaire

1er prix : Elouan Damoy, Lycée des Flandres, Hazebrouck

Titre de la nouvelle : Les dieux, l'étoile et la science

Qu’y a-t-il de plus beau qu’un ciel étoilé ?

C’est avec cette réflexion en tête qu’Alexandre admirait la voûte céleste. Son maître, le vieil Onchos, exigeait de ses apprentis qu’ils connaissent sur le bout de leurs doigts chaque astre constellant la chevelure de Nyx, déesse de la nuit. Bien que réticent au début, le jeune homme ne pouvait se passer de l’enseignement du meilleur maître d’Atlantis.

C’est donc avec aisance qu’il reconnut les nombreuses constellations et étoiles qui le surplombaient. Il admira le Cygne puis son regard survola L’Aigle, La Lyre et Cassiopée,… et s’arrêta tout à fait sur le Dragon. Les yeux plissés, il regardait dans son τηλεαστηρ cadeau de son maître pour voir les étoiles invisibles à l’oeil humain. Il ne comprit pas immédiatement ce qui avait attiré son attention dans la constellation, qu’il avait pourtant vue mille fois. Puis il eut une illumination.

Une nouvelle lumière flamboyait dans les cheveux de la nuit.

*

Il n’était pas loin de minuit quand Alexandre avait fait sa découverte, et il se précipitait maintenant pour en faire part au plus tôt à son maître. Mais, sous le coup de l’excitation, il avait oublié que celui-ci habitait presque à l’opposé des collines, et cela faisait bientôt deux heures qu’il peinait, courant vers la demeure de son maître, suivi par son fidèle esclave Arctos. Bien que tout atlante respectable ait un corps en bonne forme, courir ainsi dans le noir était épuisant.

Le jeune homme avait déjà dépassé les grandes plantations d’oliviers et les collines d’où il regardait les étoiles, et il passait maintenant les grandes murailles d’orichalque, métal précieux entre tous, dont le secret était gardé par les forgerons atlantes.

Une fois entré dans la cité d’Atlas, joyau d’Atlantis, l’élève dut courir encore une quinzaine de minutes avant d’atteindre la demeure de son maître.

Et il pensa soudain à un autre détail, d’une importance cruciale. Le maître devait dormir. Et il n’aimait pas qu’on le réveille.

Laissant esclave et affaires à l’entrée de la grande maison de pierre blanche, il envoya un serviteur chercher maître Onchos à sa place (il y avait toujours un serviteur debout, pour repousser les voleurs, accueillir les visiteurs tardifs et s’occuper du maître quand il rentrait passablement éméché). 

Le climat était relativement clément. Alexandre s’assit donc dans la cour intérieure, près d’une fontaine en forme de poissons, symbole incontestable de richesse. Il regarda son reflet à la lueur des torches, et fit en sorte de cacher sa fatigue, pour paraître au mieux devant le savant.

« Que me vaut cette visite ? » grogna soudain une voix derrière lui.

Le maître, petit homme replet à la peau blanche et à l’âge avancé, se tenait juste derrière lui.

Le ton colérique n’ayant pas échappé à Alexandre, il se redressa prestement et montra sa découverte dans le ciel avant que le maître ne le rabroue sévèrement.

Après un long silence, celui-ci déclara enfin : « Une nouvelle étoile dans le ciel est un présage divin, mais je ne saurais l’interpréter ».

Il renvoya enfin Alexandre, un respect nouveau dans les yeux, associé toutefois à une grande inquiétude.

*

Le chant du coq et la rumeur matinale réveillèrent Alexandre après de maigres heures de sommeil. L’esprit encore embrumé, il allait se rendormir quand une bagarre éclata dans la chambre qu’il partageait malheureusement avec ses trois frères. Quand ses parchemins commencèrent à voler, il jugea bon d’intervenir.

Après avoir remis à leur place ses frères, il se prépara à sortir devant un lourd miroir de bronze, qui lui renvoyait l’image d’un jeune homme brun à la peau olivâtre, et à l’air fatigué. Alexandre grimaça. N’importe qui pouvait voir qu’il n’avait pas dormi, tant des cernes se dessinaient sous ses yeux verts.

Après s’être rassasié de figues, de raisin et de pain blanc, Alexandre rejoignit sur l’Agora ses camarades et amis, Oros et Chimon. Il s’étaient tous trois rencontrés chez le maître Onchos, et depuis ne se quittaient plus. Le premier était littéralement une force de la nature, sa taille excédant sept pieds, ce qui l’amenait à deux têtes au dessus de la plupart des gens, qui se montraient craintifs devant lui (sa taille n’ayant d’égale que sa carrure). De nature débonnaire et patiente, il pouvait s’absorber pendant des heures dans l’étude d’une colonie de fourmis, talent inutile mais qui lui avait valu l’admiration du maître.

Chimon, quant à lui, était un vrai tourbillon, les pensées se succédant à un rythme effréné dans sa tête, et il n’hésitait pas à dire haut et fort ce qu’il pensait – pour le malheur de ses proches, bien souvent. 

À l’arrivée d’Alexandre, ils débattaient apparemment sur la théorie des quatre éléments, que Oros jugeait fantaisiste. Il plaidait en faveur de la théorie des atomes, qui expliquerait bien mieux, disait-il, le comportement de la matière.

Ils s’étaient tous les trois retrouvés pour participer aux thalassantes, fêtes en l’honneur de la mer et de son dieu, Poséidon. La cité toute entière allait être en ébullition pour trois jours, durant lesquels des sacrifices, des combats navals, des marchés et des célébrations seraient organisés. Les soldats étaient revenus de leur lointains combats pour cette fête, et ramenaient avec eux le fruit de leur conquêtes.

C’est face à ce défilé que se trouvaient les amis en ce moment.

- « Incroyable ! Vous avez vu la couleur de ces fruits ? Oh ! Vous pensez que ces esclaves sont des guerriers égyptiens ? Et vous avez vu ces armes ! Les barbares sont tellement en retard à côté de nous ! »

Chimon alimentait à lui seul la majeure partie de la conversation, ce qui convenait tout à fait aux deux autres, d’un naturel plus silencieux. Alexandre en avait presque oublié cette nouvelle étoile, et marchait dans la ville en fête sans qu’aucune nouvelle n’assombrisse ses pensées. Cette humeur joyeuse dura jusqu’à l’après midi, quand un premier cri retentit : « Regardez ! Dans le ciel ! »

En levant les yeux, Alexandre aperçut une vive lumière qui brillait malgré le soleil haut dans les cieux. Les habitants d’Argos ne parlaient plus que de ce signe des dieux, et l’agitation des lieux poussa les trois camarades à quitter le centre de la ville. En effet, une grande foule se dirigeait vers le temple de Poséidon, afin de savoir ce que cette intense lumière signifiait, et on avait déjà vu des gens périr dans une foule pareille.

Soudain, une voix les retint. Ils passaient devant la maison du maître, et ce dernier les invitait à entrer.

Une fois qu’ils furent installés confortablement sur les klinês, Oros demanda enfin ce qui les tracassait tous : « Maître, savez-vous ce qu’est cette lumière dans le ciel ? »

Trois regards avides posés sur lui, il réfléchit un instant et répondit :

- « Alexandre, as-tu fais part à tes amis de ta découverte ? »

Face à deux regards pleins d’incompréhension, le vieil homme expliqua de quoi il retournait, et exposa sa théorie.

- « Imaginez un instant… Si cette étoile qu’avait aperçu Alexandre était un morceau de métal, tombé depuis l’Olympe ? Il y a une description semblable au phénomène observé aujourd’hui dans un vieux manuscrit que je possède, mais j’avais cru au témoignage d’un fou. Selon lui, une lumière, visible de jour comme de nuit, descendit du ciel et tomba sur le continent. Il prétend aussi que, au point d’impact, il y avait un cratère au fond duquel se trouvait un morceau de fer pur… »

« C’est impossible ! Tout le monde sait que le fer se trouve à l’état de minerai, qu’il faut fondre et forger pour obtenir du fer pur ! »

Chimon se recroquevilla, prenant soudain conscience qu’il avait interrompu le maître. Celui-ci claqua sa langue, mécontent.

« Je disais donc qu’il trouva ce morceau de fer pur, vraisemblablement tombé du ciel. Il s’agissait donc d’un morceau de fer olympien, tombé de la demeure des dieux. Et l’étoile que tu as observée cette nuit, Alexandre, ne devait être que le reflet du char solaire, à ce moment là derrière la terre, sur le métal, conclut le professeur. »

« Êtes-vous sûr que ce métal soit sans danger ? dit Oros, inquiet, en regardant le ciel dans la cour. Il devait se trouver dans un cratère qu’il avait creusé. Et s’il tombait sur une maison ? Ou s’il était assez gros pour faire de grands dégâts ? »

Le maître secoua la tête.

- « Les dieux nous protègent, et c’est une occasion inestimable d’observer ce phénomène rare. Vous pouvez partir si vous le désirez, mais j’irai chercher ce métal dès qu’il sera tombé. »

Un long silence incertain suivit, et tous sortirent dans la cour pour observer la lumière. Peu de temps s’était passé depuis que la lumière avait fait son apparition dans le ciel, et elle semblait grossir de plus en plus, quand soudain elle se scinda. Les deux morceaux descendaient maintenant à vue d’œil, et la panique commença à gagner l’île d’Atlantis. De nombreuses personnes commençaient à voir en la lumière une punition divine et non un cadeau. Les plus virulents disaient que Zeus les punissait d’avoir voulu étendre leurs conquêtes, que c’était un acte d’Hubris, l’orgueil. En effet, cette lumière ne rappelait-elle pas celle de la foudre du roi des dieux ?

Atlas était une cité de science et de savoir. Ce phénomène, nouveau et soudain, inconnu de tous, la plongea dans le chaos. Beaucoup de gens voulurent embarquer vers le continent, et seuls quelques fanatiques ou scientifiques restèrent tranquillement chez eux. Les premiers voulaient subir la punition divine, les seconds n’y croyaient pas. La mère d’Alexandre, elle, resta pour permettre à ses fils d’embarquer dans les bateaux bondés. Ils étaient serrés dans un coin de la cale, derrière les rameurs. Alexandre rassurait ses jeunes frères, terrifiés par le bruit et la cohue régnant sur la trière. Tout en les réconfortant, il attendait la fin.

*

Ce qui se passa ensuite fut en somme très scientifique, de cette science si chère aux atlantes. Les deux fragments de roches stellaires tombèrent, l’un sur l’île, l’autre dans la mer. Le premier fragment rasa une partie de l’île. La ville d’Argos fut soufflée. Le temple de Poséidon, rempli de prêtre et de fidèles, qui pensaient y trouver un abri, fut entièrement détruit. Les fines colonnades, les fresques ouvragées, les statues, les fontaines, tout fut réduit à néant. Les bateaux furent violemment secoués, et les plus légers renversés. Sur l’île, seuls quelques paysans loin du point d’impact survécurent. 

Jusqu’à ce que le deuxième fragment prenne le relais. Ce dernier avait percuté la surface de l’eau, puis le fond marin. Pas de quoi en faire un drame me direz-vous. Et si je vous disais que, suite à cet impact, de l’eau avait bougé ? Beaucoup, beaucoup d’eau. Des quantités si astronomiques que toutes les terres d’Atlantis furent submergés, et que, près des côtes, une immense vague détruisit toute la flotte atlante, ainsi que de nombreux villages barbares. 

Un dicton atlante dit… enfin, disait : « La nature n’est pas cruelle, mais implacable ». Il fut une nouvelle fois vérifié, car rien ne subsista d’Atlantis la magnifique, la plus riche et plus grande force de l’époque… 

Toutefois quelques doutes perdurent sur la disparition de tous les Atlantes. Sans la science d’Atlantis, comment les égyptiens auraient-ils pu construire les pyramides sur le nombre Pi ? Sans leur génie astucieux, comment les lignes de la Nazca auraient-elles pu voir le jour ?

Génies en avance sur leur temps, et au savoir pourtant disparu… Nous ne pourrons jamais savoir qui étaient vraiment les atlantes, mais il y a une chose qui nous relie encore à eux… Nous regardons les mêmes étoiles.