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Baccalauréat, évaluation et formation

Un rapport sur le baccalauréat, signé par diverses inspections (dont un représentant de l'inspection des finances, et son influence est très sensible), peut être consulté sur le site du Ministère de l'éducation nationale, sous le titre: "Propositions pour une évolution du baccalauréat". A côté de suggestions intéressantes, mais probablement peu réalistes, par exemple en faveur de l'instauration de notes éliminatoires dans les matières les plus importantes de chaque série, on y trouve certaines recommandations inquiétantes, notamment dans deux domaines.

Observant, ce qui est incontestable, l'inflation des mentions au baccalauréat, le rapport l'attribue principalement aux points supplémentaires accordés aux options facultatives et en tire deux conclusions: cela "entretient le sentiment d'une perte de valeur du diplôme", et donc, ajoutent-ils, "le principe d'octroi de points de majoration afférents aux épreuves facultatives, dont l'effet est de surcroît amplifié par la mise en œuvre de coefficients multiplicateurs, constitue une anomalie qui devrait être remise en cause". Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage. Les rédacteurs semblent ignorer les consignes données aux jurys, dans les matières obligatoires à fort coefficient, pour que les notes permettent d'atteindre les résultats attendus (par exemple, interdiction de tenir compte de l'expression française et de l'orthographe dans une épreuve d'histoire, car ce serait faire de la discrimination sociale, ou encore la notation sur plus de 20 dès qu'une épreuve semble trop difficile, sans oublier les consignes pour noter généreusement les "Travaux personnels encadrés"): c'est cela qui doit susciter les doutes sur la "qualité certificative", et non pas le rôle des options. Que les options facultatives soient récompensées par l'accès à telle ou telle mention est bien le moins qu'on puisse faire pour encourager les élèves à accepter l'effort qu'elles impliquent ! Les salves tirées contre les enseignements optionnels, tous mis sur le même plan, paraissent surtout inspirées par des motifs d'économie. Leurs conséquences risquent d'être dramatiques, pour les langues anciennes et pour les autres options, en cas de réforme du baccalauréat après les prochaines élections.

Un second domaine est peut-être plus préoccupant encore. Il concerne les épreuves écrites. L'objectif est, je cite, de "dépasser le mythe de l'épreuve terminale écrite comme garantie exclusive d'équité". De beaux tableaux sont présentés, qui montrent les avantages considérables, notamment du point de vue financier, du QCM (questionnaire à choix multiples) par rapport à l'épreuve écrite. Ces beaux tableaux ont malgré tout une vertu. Chaque type d'épreuve est accompagné d'une évaluation de son coût, de sa valeur docimologique et d'autres critères d'évaluation. Parmi ces critères figure la "capacité à évaluer les compétences d'expression écrite". De façon très objective, les inspecteurs sont bien obligés de mettre en face du QCM, pour cette rubrique: capacité nulle; et en face de l'épreuve écrite: capacité élevée. En revanche, pour la rubrique du coût, en face du QCM on lit: coût faible, et en face de l'épreuve écrite: coût élevé. Et la messe est dite. Tout en avouant au passage qu'une épreuve écrite est nécessaire pour évaluer la capacité à écrire, ce que M. de la Palice aurait pu dire, ils recommandent la multiplication des QCM… Bientôt viendra le moment où la seule épreuve écrite que l'on concèdera, au moins à titre provisoire, sera l'épreuve de français, à condition qu'elle ne soit pas trop littéraire. Le problème ne concerne pas seulement l'évaluation, bien sûr. Si les QCM se généralisent au bachot, ce sera bien sûr tout l'enseignement, en amont, qui sera orienté dans cette perspective, et ce sera un nouveau, et dramatique, recul de la maîtrise de l'expression écrite en français.

Nous disons : halte au feu !